
Le chantier de la 2 x 2 voies Rennes-Angers arrive aux frontières du département, dans la forêt d’Araize. Quelles sont les mesures prises pour protéger la faune et la flore ?
Chevreuils, chauve-souris, grenouilles, renards ou hérissons, soyez sans crainte ! La future 2 x 2 voies qui traversera votre territoire a été pensée pour s’intégrer à votre environnement. Les services du Département y veillent, en préparant depuis des années l’un des chantiers routiers les plus complexes et originaux d’Ille-et-Vilaine. Un cabinet spécialisé dans les impacts environnementaux suit le projet et fait ses préconisations pour chaque espèce, à chaque étape des travaux.
Sur près de 1000 hectares, la forêt privée d’Araize est répertoriée depuis 1974 comme une zone naturelle d'intérêt écologique, faunistique et floristique. Les animaux qui y vivent traversent régulièrement la route départementale non sans risque pour eux et pour les automobilistes : « Des passages fréquents d’animaux dans le sens nord-sud ont été repérés, explique Katell Colas, responsable des études et travaux sur la 2 x 2 voies au Département d’Ille-et-Vilaine. Ces corridors écologiques seront sécurisés. » Ce qui n’est pas le cas actuellement ; des collisions avec des véhicules se produisent régulièrement.
La route élargie en forêt
Avant de commencer les études, il a donc fallu prendre une décision : la voie express peut-elle traverser la forêt ? « La concertation en 2008 avec les maires, les riverains, les associations écologistes et les agriculteurs a répondu oui, raconte Bruno Rambert, chargé d’études au Département. Passer par la forêt est moins impactant que de la contourner. » Cela évite un détour coûteux sur des terres agricoles, d’autant que la route est déjà tracée au milieu du bois.
« Nous allons construire une nouvelle route à 2 x 2 voies en lieu et place de la route actuelle. Nous devons élargir vers le sud, la rive nord sera identique » ajoute Bruno Rambert. Concrètement, cela signifie que les arbres en lisière nord, habitués à grandir le long d’une route, resteront dans leur alignement d’aujourd’hui. La rive sud, en revanche, va devoir être abattue sur plusieurs mètres. En tout, près de 9 hectares devront être défrichés. « Les services de l’Etat nous ont demandé de replanter cinq fois la surface défrichée, ce qui fera 43 hectares de nouveaux arbres. » Environ 10 ha ont été acquis pour être boisés dans le prolongement direct de la forêt et plus de 30 hectares supplémentaires dans un périmètre géographique plus étendu (50 km alentour).
Eviter, réduire ou compenser l’impact environnemental
Le principe pour les travaux est résumé en trois mots : éviter / réduire / compenser. Katell Colas détaille : « Si c’est possible, on évite, c’est-à-dire qu’on ne touche pas au milieu écologique. Si on n’a pas le choix, on réduit l’impact au maximum. Et si vraiment un chantier impose de détruire un milieu, il faut compenser à proximité. » L’impact sur le milieu agricole entre Martigné-Ferchaud et la forêt (plus de 50 ha) nécessitera, lui aussi, une compensation. Pour les agriculteurs, cette fois. « Un aménagement foncier est en cours pour redistribuer les parcelles et permettre de limiter et de réparer l’impact de la nouvelle infrastructure sur le milieu agricole.»
Des associations naturalistes comme Bretagne Vivante ont participé au processus de concertation. Pour faciliter les passages d’animaux dans la forêt, il fallait qu’ils puissent traverser la 2 x 2 voies sans aucun obstacle, sans s’en rendre compte. La nouvelle route doit être invisible. La décision a donc été prise de moduler la hauteur de la route, pour que les animaux soient le moins perturbés possible et puissent rester au niveau du sol. « Il faudra creuser sous le pont pour la grande faune, et surélever la route au niveau du passage pour la petite faune » souligne Katell Colas. Un dénivelé de -7 à +7 mètres dont l’automobiliste n’aura pas conscience.
(1) Les études paysagères et d’impact environnemental sont réalisées par le cabinet AEPE Gingko : http://www.aepe-gingko.fr
(2) ZNIEFF : programme d'inventaire lancé en 1982 par la loi Bouchardeau, recense les espaces naturels remarquables et la présence d’espèces à fort intérêt patrimonial.
Douze passages, des mares et des gîtes
Deux ouvrages importants seront construits. Le premier fera 45 mètres de long, du type de celui qui existe à Liffré au-dessus de l’autoroute. Il sera destiné à la grande faune (essentiellement les cervidés) et au passage des grumiers (camions servant au transport du bois). La route passera donc sous le niveau de la forêt à cet endroit.
Le deuxième ouvrage fera 15 mètres de large, surplombant la forêt, pour le passage de la « petite faune » (sangliers, renards, lapins, etc.) Ici, la voie express passera par-dessus.
Des ouvrages hydrauliques seront créés sous la avec des encorbellements (« trottoirs » surélevés) pour permettre le passage des animaux en cas de crues des ruisseaux.
Des « crapauducs », petits tunnels en béton pour le passage des batraciens, sont prévus. D’autres passages plus conséquents répartis le long de la route permettront également la traversée de la petite faune. L’ensemble de ces aménagements assurera la continuité des corridors écologiques pour que la route ne fasse pas barrière
Des clôtures à gibier et à amphibiens seront installées tout au long de la route. Aux croisements avec les allées forestières, les clôtures seront plus hautes pour surélever le vol des oiseaux et des chauve-souris et éviter les collisions avec les véhicules.
Des mares seront recréées ainsi que des gîtes pour les chauves-souris dans les ponts. Les chiroptères sont des espèces fragiles et protégées qui nécessitent un suivi particulier avant le lancement des travaux.
La boulaie à sphaignes, une zone à préserver
Concernant la flore, outre le reboisement important de plusieurs surfaces à proximité de la forêt, une mesure a été prise pour sauvegarder un habitat particulier : la boulaie à sphaignes. Présentes dans des dépressions tourbeuses, cet habitat est constitué d’un peuplement assez dense de bouleaux sur un épais tapis de mousses spongieux et élastique, du fait de la présence constante d’eau dans le sol.
Quatre hectares ont été achetés par le Département au propriétaire de la forêt pour que cet habitat demeure préservé.
Derniers kilomètres avant le 49 !
Juste avant d’entrer en Maine-et-Loire, les voyageurs réguliers entre les deux villes connaissent bien la forêt d’Araize, traversée par l’actuelle RD 94 en limite de quatre départements (Ille-et-Vilaine, Loire-Atlantique, Mayenne et Maine-et-Loire). Une route étroite et dangereuse, connue pour ses excès de vitesse, ses collisions avec des animaux sauvages et ses sorties de route.
Entre Rennes et Angers, la 2x2 voies n’est plus très loin de la continuité : il ne manque plus qu’une vingtaine de kilomètres pour relier Retiers et le bout du département, à la sortie de la forêt d’Araize, dont 7 6km déjà en travaux depuis Retiers.
Le chantier en forêt d'Araize démarre ce mois de septembre et sera achevé fin 2017. La partie entre l’échangeur à l’entrée de la forêt et Martigné-Ferchaud sera réalisée dans la foulée.
Le coût des mesures écologiques représente près de la moitié du budget de l’aménagement en 2x2 voies en forêt d’Araize qui s’élève à 15 millions d’euros au total.
Objectif 2017
- Septembre 2015 – fin 2017 : fermeture de la RD 94 en forêt. La circulation est déviée depuis Martigné-Ferchaud par Châteaubriant en Loire-Atlantique. Seul le trafic local et le trafic lié au chantier seront autorisés dans le village de Saint-Morand.
- Septembre à décembre 2015 : défrichement forestier.
- Septembre 2015 à juin 2017 : construction des ouvrages d’art : 5 ponts dont un de 45 m de long et un échangeur.
- Mars 2016 à juin 2017 : travaux de terrassements.
- Mars à septembre 2017 : réalisation des chaussées.
- Septembre à novembre 2017 : mise en place de la signalisation, des glissières et du marquage.
- Fin 2017 : mise en service de la section à 2 x 2 voies.